Le prix du vin servi au restaurant et le droit de bouchon

Lu récemment dans le magasine Challenges: les prix du vin dans la restauration dépasseraient les limites du raisonnable.

Le prix moyen de la bouteille de vin à la carte représenterait 4 fois son prix d’achat au producteur. Ce facteur s’envole dans les établissements les plus hauts de gamme. Intéressant :

Dans certains restaurants haut de gamme, le client peut payer sa bouteille jusqu’à 10 fois le prix payé au producteur

  • Ce facteur est inversement proportionnel au prix de la bouteille: une bouteille achetée 7€ au producteur serait revendue 4.5 fois plus cher, alors que la surcote d’une bouteille à 25€ ne serait que de 2.5.
  • Cette surcote est une spécialité française. Les restaurateurs anglais, italiens ou encore espagnols ne pratiqueraient qu’une surcote de 2.5 en moyenne.
  • Enfin, le consommateur qui voudra se rabattre sur le vin au verre sera peut être moins assommé par la boisson, mais plus par la facture. Une règle devenue implicite veut que le verre de vin soit vendu au prix où la bouteille a été achetée au producteur !

Dans cet article de Challenges, les restaurateurs s’expliquent: « les charges salariales sont trop fortes pour nous permettre d’atteindre les ratios de nos voisins européens. » Elles sont certes plus fortes qu’en Espagne. Mais j’ai en tête 2 ou 3 bars à vins ou cavistes parisiens, soumis à un même niveau de charges salariales, et chez lesquels la surcote des bouteilles d’entrée de gamme n’était pas supérieure à 2.5.

Autre argument avancé par les restaurateurs : le standing du service. « Stocker les vins dans des caves de qualité, les servir dans des carafes et des verres à vin, anticiper un taux de renvoi des bouteilles bouchonnées a un coût. » Je ne pense pas qu’il y ait plus de bouteilles bouchonnées en Angleterre (où l’on sert d’ailleurs des vins français). Je ne pense pas non plus que le taux de bouteilles bouchonnées soit inversement proportionnel au prix de la bouteille !

Les bars à vins sont les grands gagnants des pratiques de la restauration

Le fait est que la restauration française fait son gras sur le vin. Les restaurateurs tendent à réduire leur marge sur les repas servis en faisant le pari que le client attiré par le repas consommera du vin, sur lequel le restaurateur ferra sa marge.  Le vin peut représenter jusqu’à 40% de la marge générée dans la restauration dite « gastronomique ». En langage marketing : le restaurateur fait du « cross-selling » !

D’ailleurs, c’est de bonne guerre. Mais enfin cette disproportion des prix a pour conséquence originale l’essor des bars à vin, et autres cavistes, qui servent des vins de qualité, à prix accessibles, et proposent de les accompagner par des plats simples, souvent froids : assiettes de fromage ou de charcuterie. C’est costaud, le service y est souvent rustique, mais l’ambiance est là !

Le droit de bouchon tend à se développer en France

Une autre tendance vient profiter de ces prix abusifs : les restaurants pratiquant le droit de bouchon. Dans ces établissements, le client vient dîner avec sa bouteille de vin, et s’acquitte du droit de bouchon au titre du service. C’est une situation gagnant-gagnant ! Le restaurateur fonctionnant au droit de bouchon n’a plus à payer la licence nécessaire à la vente d’alcool, ni a s’équiper d’une cave coûteuse et le client n’est plus restreint par les cartes limitées des restaurateurs. Il achète son vin dans la distribution, à un prix abordable.

Cette tendance touche à peu prés tous les types de restaurants: les restaurants de quartier, les brasseries, les bars à vins. Même les restaurants étoilés s’y mettent, à l’exemple du ‘Diane‘, avenue Georges V à Paris.

Même si le concept ne rencontre pas systématiquement le succès escompté, il s’agit pour ces restaurants de se différencier et d’attirer un nouveau type de clientèle. Si le prix du droit de bouchon varie généralement de 5€ à 10€ la bouteille, de plus en plus, les restaurateurs le proposent gratuitement et propose des modèles innovants. Certains proposent aux clients de s’inscrire à leur club pour y avoir droit. D’autres ne proposent le droit de bouchon que certains jours par semaine, ou encore sur réservation uniquement. D’autres encore collaborent avec un caviste voisin en proposant à leur clientèle d’aller chercher leur bouteille en face. C’est le cas du ‘Barav’ à Paris, place de la République.

« Le Diane » a lancé une expérience intéressante : lors de la réservation, le client peut annoncer la bouteille qu’il compte amener, et le restaurateur lui propose alors de cuisiner des plats qui s’accordent avec son vin.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Vous êtes restaurateur, sommelier ou consommateur, partagez votre opinion en commentaire !

Jusque là, il y a 7 commentaires

Samarcande

Je parlais justement de cette surcôte avec un collègue allemand ce midi et d’après lui, la situation est la même en Allemagne qu’en France. Je me souviens effectivement avoir vu en Allemagne dans une trattoria où l’on peut très bien manger le midi pour 6-7 € (eh oui…) un ardoise indiquant une bouteille de vin italien à 82 € ; ce qui m’a le plus surprise dans l’histoire, c’est que le nom du producteur n’était même pas indiqué : comment accepter de payer un tel prix sans avoir accès à la plus basique des informations ? Il semble parfois qu’en Allemagne, il suffise de mettre en avant un côté exotique pour que le pigeon… pardon, l’amateur occasionnel de vin… soit prêt à alléger allègrement son porte-feuille (c’est d’ailleurs aussi vrai pour les plats).
Ce que tu dis sur le vin s’avère en réalité exact pour toutes les boissons en France : j’ai repéré que dans un Metro alimentaire (ce grossiste réservé aux entreprises), le jus de fruits Pago coûtait à l’unité 5o centimes alors qu’il est vendu combien à Paris, 4 € ?
Ce gonflement des prix est absolument scandaleux dès lors qu’il n’y a pas de travail effectué par le restaurateur (à la différence de la réalisation de cocktails par exemple ou alors de la suggestion d’une alliance mets-vin). Les étrangers s’étonnent souvent que les cafés soient vides mais c’est ainsi : le pigeon paie pour tous ceux qui n’ont pas osé entrer…

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perreau

j ai paye le droit de bouchon pour une demi bouteille, je n’ai pas apporte ma bouteille
est ce normal

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Barrois

bonjour , je suis un peux perdu avec toutes ces informations, j’ai pris une bière et ma femme un vin au verre dans un restaurant/bar a vin , un droit de Bouchon de 3 euros a été appliquées a son verre et pour ma part un droit de capsule, je ne trouve aucune info sur cette dernière… bref le droit de Bouchon s’appliquent aussi au vin au verre et a la bière même quand il ne s’agit pas de nos bouteilles ?

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